Langue et judéo-christianisme
Chers lecteurs, je vais tâcher d'écrire ce billet sans bouquin à portée de main, autant dire sans filet et ça craint du boudin. Bref.
Devinette : qu'y a-t-il de commun entre vivre une traversée du désert, une période de vaches maigres, avoir une poutre dans son œil et grimper au septième ciel ? Rien à voir avec une quelconque célébrité française, il s'agit plutôt d'une célébrité internationale, la plus grande, l'immense : la Bible.
Eh oui, la Bible.
Souvent, je trouve que le concept de culture judéo-chrétienne semble abstrait pour les gens, ils ont l'air de penser qu'il faut avoir lu les bouquins sacrés, étudié, etc., en bref, que c'est un truc d'intellectuel qu'a rien d'autre à fout' de son temps.
En vérité, c'est on ne peut plus concret : la datation, la semaine, le week-end, les fêtes (la saint Valentin, par exemple), dont tout le monde constate la présence réelle et, donc, de nombreuses expressions dont l'origine est oubliée depuis longtemps. Même moi, je m'y perd.
Par exemple, la traversée du désert. A priori, cela me fait penser à l'Exode (mais aussi à De Gaulle, Winston Churchill et Dick Rivers, naturellement), lorsque Moïse entraine son peuple hors d'Egypte, mais il n'est pas question de cela. La traversée du désert fait référence à une épreuve de Jésus, une épreuve terrible durant laquelle il dut, seul, et donc dans le désert, affronter Satan et ses tentations. Satan et sa rhétorique, Satan et ses promesses, ses cadeaux, sa folle séduction, son immense force de conviction... Mais Jésus triompha. Ce qu'il reste de cette histoire dans notre expression, c'est la traversée d'une épreuve en solitaire, loin des lumières de la rampes, des flashs et des spotlihts. Hollywood a tout bouffé.
Et les 40 jours du Carême, bien sûr...
Et le 7e ciel, d'où sort-il ? Quid des six premiers ? Ici, il faut revenir sur l'histoire de la Bible (et non sur celles de vos émois sexuels, ne vous en déplaise) qui est une compilation de livres accolés les uns aux autres pour former cet ensemble hétérogène. Hétérogène, jusqu'à un certain point, car c'est dans un souci de cohérence que certains textes dit apocryphes ont été retirés de l'ensemble. Mais pour beaucoup, on les trouve toujours dans la Thora, la Bible des Juifs qui correspond à l'Ancien Testament chrétien. Ainsi sont passés à la trappe les échelonnages du ciel selon le degré d'extase atteint. Ne demeure aujourd'hui que le troisième ciel que Paul dit avoir atteint dans une lettre aux Corynthiens.
La paille et la poutre sont également issues du Nouveau Testament (ou les aventures du Petit Jésus) où un gus crache ardemment sur un autre, critiquant son attitude peu dévote avec acidité. Mais Jésus (qui est charpentier et se sert de sa culture sylvestre pour faire des métaphores) qui est le témoin choisi de ces remarques ne l'entend pas de cette oreille et remet le râleur en place en le traitant d'hypocrite. Hypocrite, car aveugle à la poutre dans son propre œil, il critique la paille dans l'œil de l'autre : la dévotion commence par l'amour du prochain et l'examen de sa propre conscience. A un stade plus anecdotique, il n'est pas impossible que l'expression "mon œil" soit également une référence à cette parabole, dans le sens où cela exprime un doute sur une affirmation que l'on suppose mensongère. Par contre, je n'ai pas de plus ample information à propos de "mon cul, c'est du poulet", pardonnez-moi.
Enfin, les vaches maigres... Alors, je crois qu'il s'agit de Jacob, mais sans certitude, en tout cas, il est bien question de Joseph. Joseph, victime de la jalousie de ses frères a été abandonné dans un puits où il est recueilli pour être vendu comme esclave à Pharaon (un truc dans le genre, mais t'as qu'à véfrifier, ce doit être dans la Genèse). En effet, Joseph a la faculté d'interpréter les rêves et Pharaon est tourmenté par l'un deux qui le tourmente nuit après nuit. Pharaon se trouve au bord de l'eau, et en surgissent sept vaches grasses. Puis surgissent sept vaches maigres, qui avalent les vaches grasses, sans pour autant en profiter et demeurant toujours aussi maigres... Joseph lui explique qu'il s'agit de la symbolisation d'années de bonnes et de mauvaises récoltes. Et si Pharaon ne prend pas garde, ne fait pas de réserves supplémentaires à celles qui sont faites habituellement, dans sept années de grâce (de grasses...) son pays va vivre sept années de disette, voire de famine. Voilà pourquoi, quand on a du mal à remplir le frigo, c'est une période de vaches maigres.
Pour en savoir plus, sachez que Google est votre ami et qu'il y a une nouvelle édition de la Bible en bande dessinée en librairie en ce moment même. Bonnes
lectures.